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Promenade accompagnee au jardin

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Literature Text

Promenade accompagnée au jardin.
(Mon jardin enlacé au treillis du mental et de l'âme).



Ce jardin tout au fond de ma tête
Qui pousse libre et tout de travers
Sous la force du beau et malgré
Le vent mauvais que souffle ce monde.

Rappel d'une enfance qui s'efface :

Bien enracinées aux âges tendres
Que l'enfance heureuse a fait germer,
Les poussent s'agrippent de leurs ongles
À chacun de ces souvenirs anciens.

Et ces racines plongent profond
Dans le cœur même de mon dasein
Où l'effervescence de la vie
Tâtonne aux portes des possibles.

Dans ma tête ouverte au ciel changeant,
Le jardin est ce grand labyrinthe
Où le souvenir étend tous mes rêves
En grands carrées de mille couleurs.

Et parfois, au détour d'une allée,
Se trouve, que je croyais perdu,
Un moment si beau, presque effacé
Par ce jardinier fou qu'est le temps.

Un moment que j'avais égaré,
Caché aux filaments des neurones,
Là où foisonnent les araignées
Qui tissent la toile de l'oubli.

Il arrive aussi que tout se colore,
Bariolages de tons et  teintes
Des illustrations de notre enfance
Qui nous soulevaient, époustouflés.

Mon jardin se mesurait en pieds
À parcourir la terre pieds nus
Et les mains étaient pleines de pouces
Pour bien y compter les pieds limaces.

Et l'aurore aux doigts roses l'ouvrait
En recueil de contes et légendes
Qui s'égrenaient en plantes et fleurs
Qu'un rayon de lune refermait.

Les épines des roses si belles :

Parfois aussi, quand le temps est rouge,
Je dois me plonger aux aubépines
Qui transpercent d'aiguilles mon nu
Pour épingler le moment de sang.

Piqûre cuisante de cette guêpe,
Sombre Reine des Cœurs, reniflant
À cent lieues notre moindre faiblesse
Pour nous enfoncer profond son dard

Avec tout l'essaim des sœurs guerrières
Fondant sur les os dénudés
Des nous, en cadavres gémissant
D'une dérive d'éternité.

La nuit venue, quand elle est bien douce,
Mon crâne s'ouvre en observatoire
De ce firmament tout étoilé
Dont je ne suis, hélas, qu'étranger!

Comme une fleur ouvrant, si fragile,
La coupole frêle de ses pétales :
Dernière offrande aux dieux effacés
Gouvernant les mystères de ce monde.

Le côté obscure du jardin :

Mais il est des coins de ce jardin
Qui demeurent dans une pénombre
Où je ne m'aventure jamais,
Où rôdent des choses innommables!

Un jardin dans ma tête,  envahi
De ronces par le temps qui s'agrippe
Sur le tout et le rien pour y faire
Grandir les ruines d'un sombre spleen.

Un jeune oiseau croqué par le chat
Avant de s'envoler en Icare
Vers un inatteignable soleil :
Cruelle, si cruelle la vie!

Ah cette douleur qui nous traverse,
Dans ce vertige où nous basculons,
De perdre sans cesse la splendeur
Des plus beaux moments qui nous échappent.

Et plus en moi, ce jardin grandit,
Et plus il se perd dans le lointain
Où les brumes de l'oublie le sucent,
Le grugent et n'en laissent que des os.

Archipel en éclats de lumière :

C'est parfois un sombre sapinage,
Où, en maître des lieux, l'obscur règne,
Où, ici et là, il ne subsiste
Que quelques îlots d'une lumière :

C'est le précieux archipel ambré
Où flottent en rappel ces lambeaux
D'une mouvance ancienne égarée
Dans les éclats du miroir brisé.

Jardin des jadis ensemencés
Où je cueille des roses fanées
Que la nostalgie a conservées :
Images aux pétales figés.

Iles de jadis déjà si vieux :
Du rose éclatant des cœurs saignants
Au rouge souffrant des Sacré-Cœur,
Des dahlias en violet de dentelles

Aux pavots soyeux comme échappés
D'un lointain Orient à raconter,
Des éphémères hémérocalles
Aux hydrangées lourdes de mémoire.

Une île se noie en la souvenance
De la douceur d'un premier amour :
En ce sous-bois d'une nudité
Où la lumière tremble la chair.

Une île en cordon chargé de vie
Qui pousse en hurlant son premier cri :
Si fine masse de chair tremblante
S'abandonnant aux bras qui le bercent.

Les îles en dérive du fleuve
Entre les verts jaunes des prairies
Et le bleu violacé qui se noie
Au loin sur le sommet des montagnes.

Quand, aux berges du fleuve géant,
Tes cheveux, emportés par le vent,
Allaient aux nuages s'emmêler
De l'autre côté sur les montagnes.

Une île de ces moments volés,
De ces instants d'une beauté pure,
Où le réel s'ancre dans le rêve
Et où l'obscène  se fait fragile.

L'inéluctable fin du jardin :

En ce jardin apocalyptique,
Poussent les charbons sombres du diable
Et les aubépines qui transpercent
En un infiniment notre chair ;

Le monde est fou qui court à sa perte,
Marchant sur les braises incandescentes
De ses forêts, de ses combustibles,
Y dansant son anéantissement.

Au jardin heureux d'une naissance,
La mort déjà derrière la porte.
La fleur si belle, vite coupée
Pour garnir le vase croupissant

Où Dieu, crapaud à la bave acide,
Se cache dans la non-ingérence
D'un monde qu'il a si mal créé;
Pourquoi en serait-il responsable?

Le jardin d'Alice et des merveilles :

Quand le jour se lève un peu plus tôt,
Déstabilisant le quotidien
En promesse de quelque nouveau,
Comme si une porte s'était ouverte

Entrebâillant pour nous juste un peu
Ce jardin espéré des merveilles.
Dans notre tête, ça s'endimanche
D'un jour d'été tout ensoleillé.

Au cœur du jardin, nous recherchons
La clé du vécu qui nous échappe
Depuis l'hier de notre échouerie
Sur les berges arides de ce monde.

Quand nous arriverons à la porte
Où le temps de ce jardin achève,
Aurons-nous dans nos mains cette clé
Pour, à la fin, ouvrir cet ailleurs?

Le jardin au souffle des miroirs
Où les amours exaltent leurs cris
En pulsations d'une nudité
Qui les mouille du scintillant givre

De la neige fraîchement giclée
Sur la nuit ouvrant pleine sa lune.
Il y est toujours si rassurant
De s'y fondre en faisant de grands anges.

Jardin en vertige des saisons :

Suivez-vous avec moi le sentier
Des fils d'or de la courtepointe
Brodée de nos deux cœurs emmêlés
Aux couleurs changeantes des saisons?

Des automnes en teintes fauvistes
Où, en transparence lumineuse,
Les tons se détachent un par un
Pour se replacer sur la palette

Et comme le soir qui tombe du jour,
Les feuilles sur le sol tirent le drap,
Se recroquevillant dans ces rêves
Rémanents de bourgeons à s'ouvrir.

Puis, les hivers en grondement d'ours
Où le vent se fait blizzard express
Et tire au loin les flocons de neige
En convoi sans fin de poudrerie.

Je regarde, Émile, à la fenêtre,
Le jardin au merveilleux givré,
Dédale de volutes glacées
Où le cri s'engrave dans le froid.

Printemps aux verts tendres et filles
Qui se déclinent en ces parfums
De fleurs de lilas, de cerisiers
Aux pétales blancs du mois de mai.

Printemps où la nature se masturbe
Au ventre de la vie qui renaît,
Qui, en soudaine éjaculation,
Glisse aux cuisses de la terre offerte.

En allongés de corps sur l'été,
Aux cuisses ouvertes sur l'envol,
En attendri d'un divin sourire,
En aperçu de ce tendre  éden.

Pieds nus dans la terre retournée
De mon jardin baigné de soleil,
Je réchauffe  mes racines nues
Dressant mon âme palétuvier.

Mon jardin de pluie et tout en gris :

Il est, comme chez-vous, des jours tout gris
De grisaille et de rouille limaille,
Où il bruine sans fin sur mon cœur
Ces gouttelettes d'un vide acide.

Mais, parfois aussi, le sang lui manque,
Il est en anémie de tendresse
Avec dans la gorge, qui l'étouffe,
Une arête hérissée de disgrâce.

Tâtonner sur les chemins maudits
Des interdits enneigés de miel
Et se laisser porter en ivresse
D'un soi tout autre que l'on s'invente.

S'enivrer à l'hydromel maudit
Pour oublier ce malheur immonde
Du bien et du mal s'affrontant
En guerre éternelle et fratricide.

Dites-moi ce que vous devenez
Quand il pleut à verse dans votre tête
Où votre forteresse dressée
A ses murs guimauves qui coulent?

Quelle monstruosité immorale
D'un inconscient marécageux erre,
Dans votre jardin sous ces eaux glauques,
Y remuant un limon infâme?

Dans le jardin au déni d'enfance :

Mais, dites-moi, vous au féminin,
Dans votre jardin rouge des règles,
Le cœur bat-il un peu plus vite
Du possible d'une vie à naître?

Combien d'elles ont porté l'enfant
Que pour le coucher dans le tombeau
En satin sombre des jours de deuil
Avant qu'il ne glisse en noircissure.

Un coin du jardin est toujours triste
Des filins coupés de chaque enfant
Que le non-sens du temps, métronome,
Guillotine en pantin inutile.

Au jardin de la piété fervente :

Au jardin de ma tête, je m'agenouille
Aux balustrades des intuitions
Pour y grignoter l'hostie si blanche
De ce clair de chair d'une espérance.

Jardin de naïveté dévote
Où les bons sentiments font si mal
En déplumant à vif l'âme nue
Pour la farcir d'intentions si bonnes.

L'encre séchée de ces vérités
Qu'il ne fallait ni penser, ni voir,
En gardant les œillères d'une foi
Qui s'acharne à poignarder au cœur

La masse fragile et sans défense
Au pourtour de l'humanité souffrante,
La crucifiant sur l'autel béni
D'hurlantes certitudes maudites.

Que reste-t-il d'un ange sans membre
Qui pisse le sang d'absurdité
Du vaste univers qui le renie?
Quoi de plus, que juste une souffrance?

Du Jardin perdu d'un antérieur,
Dressant en ruines sa tradition,
Nous ne savons rien de ce qui fût,
Ni même si ce temps ouvrit le ciel!

Le jardin noyé au désespoir :

Quand la douceur du soir s'insinue
Jusque dans la moelle de nos os
Pour attendrir l'exaspération
De cette condition d'inutile

Créature, perdue au cosmos
De cet espace incompréhensible
Où une faible lueur nous ancre
En nos émotives certitudes.

Notre corps crucifié à la terre
En une silencieuse prière,
Les organes joignant de leurs doigts
L'incommensurable petitesse.

Jardin éphémère de nos têtes
Où nous nous imprégnons d'une esquisse
Du possible que nous aurions voulu
Si nous étions maître du destin.

Quand vos vociférations s'élèvent
En hurlements sous la lune pleine,
C'est que nous avons un grand dégoût
D'une condition de cancrelats

Écrabouillés à répétition
Dans les racoins obscurs du néant :
Sommes-nous donc nés que pour cet amour
Qui conçoit le cadavre à venir?

Nous n'avons que ces ailes du temps
Aux membranes trouées de néant
Pour vainement tenter de s'envoler
Vers un ailleurs bourré d'inconnu.

Au jardin de nos cœurs remués,
Un orage amasse sa noirceur
Pour hacher menu de froides grêles
Toutes nos fragiles certitudes.

L'orage gronde notre misère
En violon strident désaccordé,
Nous fouettant au sang de cet archet
D'un Dieu jouant au sado-maso.

La mort plantée en épouvantail :

Jardin des angoisses et maléfices
Où rôde, costumée, la mort-fée.
Un jour son angoisse vous saisit
Et vous n'êtes déjà plus qu'une ombre,

Juste un cri errant entre les mondes
Où tous les possibles vous bousculent,
Piétinant en sanglante bouillie
Votre non-être dans un néant!

Les noirs corbeaux s'assemblent déjà
Au coin des quartiers et des forêts,
Juchés dans les arbres les plus hauts,
Funestes témoins d'une rature.

Juteuse fresque d'une citadine
Endurcie de ces  promiscuités
Les plus anonymes des quartiers
Où tout chacun est son couvre-feu.

Le jardin de la mort annoncée
Où le corps se noie par en dedans,
Où la morphine calme le mal
Qui pourrit déjà tout l'intérieur.

En morituri te salutant
Pour ce Dieu d'une miséricorde
Tellement infini qu'il t'agonise
En t'étirant sur l'éternité.

Le poids si lourd du corps au jardin :

La nudité en une odyssée
Dans un matin nouveau frais levé,
Comme jadis une aventure d'enfance
Sur un îlot de rochers jetés

Au milieu d'une mer d'herbes tendres.
Juste un peu vivre tel que l'on est
Sans tous ces artifices et masques
De mascarades qui s'éternisent.

Le corps redevenu ce vivant
En torsion d'une animalité,
En souplesse de ses intuitions,
En communion avec la nature.

Le poids du corps au jardin d'Éden
D'avant l'interdiction de ce fruit
Du bien et du mal dont même Dieu
Ne saisit pas très bien les nuances.

Jardin la nuit fait pour l'amour :

Mon jardin s'endort avec le soir
Et, la nuit, il se mouille de lune
Pour que mes rêves puissent germer,
Grandir et s'accrocher aux étoiles.

Quand le sperme glissait sur tes cuisses
En marée haute d'une jouissance,
Puisqu'il faut bien que le monde gicle
Un peu de bonheur pour qu'on y vive.

De petits morceaux de ta chair nue
En entrevue d'une inconvenance
Où la béance, ivre d'un orgasme,
Mouille l'univers d'un peu de jus.

Le matin, toujours un peu acide
De tous ces rêves mal digérés,
S'étire sur le jardin fleuri
De ce jour que l'on voudrait si beau!

Parfois, comme échappé du soleil,
Un rayon d'or t'illumine, icône,
En adoucie de chairs endormies,
Paradis d'Ève, jamais perdu.

Dans ma tête, arène ouverte au vent,
Tourne le carrousel des amours
En enchevêtrements amusés
D'étalons et de vierges lascives…

Tournent, tournent les chevaux coït
En labours au jardin des venir,
Ensemençant le sillon ouvert
En moite jouissance à y fleurir.

Un jardin tissé en une étoffe
Si lâche que tous les vents y passent,
Mais que je te vois en nudité
Tellement rassurante de ton âme.

Au jardin du grand dortoir troué
Des désirs au ressenti  ailé,
Les nuages retroussent jupons
En géantes fantasmagories

Que le vent emporte aux hier
Où, couché au sol les yeux levés,
Je voyais des rêves en dérive
De ce temps qui m'était étranger.


Le jardin en impression de toiles :

Jeux des couleurs en ces grands jardins
Des toiles de Pellan au musée
Où la vie remue moléculaire
Pour s'engrosser d'un peu de beauté.

Ôtez vos chapeaux noirs à melon
Aux jardins de nuit, si intimistes,
Où Delvaux conduit ses ingénues
En procession aux gares d'ailleurs.

Prenez le train de cette inconnue,
Venue de ces lieux en point de fuite.
Accompagnerez-vous son voyage
Beaucoup plus loin qu'au bout de vous-mêmes?

Le sommeil ne peut que vous trahir
Dans ce vain repos que vous cherchez;
Le temps n'en est que toujours plus mou
Où Dali enlise sa démence.

La vie tourne en jaune, pour ce Christ
De Gauguin fixé à la jonction
D'un' folie pieusement agonisante
Et d'un' raison d'absurde délire.

Peut-il y pousser un peu d'espoir?

Dans ma tête, il y a ce grand jardin
Sur une terre dont les nuages,
Voiles gonflées sur la corde à linge,
Emportent l'éden vers un ailleurs.

Des fleurs pour allumer notre été
De colorants qui ensemencent
En dilution de leurs encres-vie
La vulve vierge de nos espoirs.

L'espoir en un lampion vacillant
Au fond d'un Vatican océan
D'une réflexion désincarnée
Où a déjà sombrée la raison.

Cet espoir que, pour ce Titanic Terre
Voguant aveuglément sur sa foi,
L'iceberg du réel ait fondu
En ces larmes de notre remord.

Nos bras agités en funambules,
Nous avançons en lents tâtonnements
Sur le fil si mince d'une espérance
Que l'autre côté devrait exister.


Un dernier tour au jardin qui ferme :

Je prends encore un peu votre main,
Y partageant un peu de votre émoi
À glisser ainsi le souffle court
Dans les allées d'un rêve fané.

Parfois, je résonne en dissonance
Comme d'un mal accord de moi à moi :
Décalage de la réflexion
Dans le miroir de la traversée.

Le clocher sonne au loin d'une enfance
Pour habiller le jour d'un dimanche
Où le temps mou se fige dans l'ambre
Du souvenir qui en garde la trace.

Les pas étirés se font plus lourds
Quand les derniers feux du jour s'éteignent
Et que nous avons sur nos épaules
Tout ce poids d'une vie que l'on traîne.

J'y étale de plume et de verre
Une couche de nostalgie
Aux arceaux d'arc-en-ciel
Et aux ruines de pierres tombales.

Des fleurs aux robes en transparence
De ces coloris ensoleillés
Que le jour effeuille de ses doigts
Et dont même la nuit se souvient.

Parfois, le vent soulève ta robe
En une aube nouvelle de ce temps
Qui nous est encore un peu prêté :
Dernier tour au carré du jardin.

Tous ces mots sont les fleurs de l'esprit
Récoltés en gerbes de poèmes
Et agencés  en bouquets de vers
Dans le grenier ouvert de nos têtes.

Les pieds nus en ces traînées de boue…

Ce jardin tout au fond de ma tête
Qui pousse libre et tout de travers
Sous la force du beau et malgré
Le vent mauvais que souffle ce monde.
Promenade accompagnée au jardin.
(Mon jardin enlacé au treillis du mental et de l’âme).


Ce jardin tout au fond de ma tête
Qui pousse libre et tout de travers
Sous la force du beau et malgré
Le vent mauvais que souffle ce monde.

Walk together in the garden.
(My garden entwined on the lattice of the mind and soul).


The garden at the back of my head
That grows free and all wrong
under the force of the beautiful and despite
The ill wind that blows this world.
© 2012 - 2024 hyneige
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